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Carnet de voyage d'une joueuse de Go belge en Chine
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20 août 2009

Guiyang, le 20 août

Je continue à adorer la sensation de l'avion qui décolle. Le moment où, assise dans mon siège inconfortable, serrée entre mes voisins inconnus, je sens soudain mon corps s'incliner vers l'arrière et rebondir tendrement au rythme de l'avion. La pression qui enserre ma tête, ce sont les mains des anges qui me portent vers le ciel, des mains fortes et délicates qui m'emmènent ailleurs. Les enfants crient, je regarde par le hublot ; peu à peu le sol s'éloigne et les maisons deviennent des maisons de légo, de playmobil, puis de minuscules maisonnettes de monopoly. Les nuages se referment sous nous en un océan de coton blanc, et le monde n'existe plus ; il n'y a plus que moi, mes voisins, les hôtesses, le petit monde en boîte de conserve pour quelques heures.

C'est dans le vol Bruxelles-Beijing que j'ai vu un des plus beaux paysages de ma vie. Je m'étais réveillée par hasard au milieu de la nuit et, sans bouger d'un poil dans ma couverture d'avion trop mince et trop petite, j'ai glissé un oeil par la fenêtre. J'ai eu la surprise de voir la mer de nuages déchirée en un grand trou, et sous ce grand trou, tout le paysage était couvert d'un mince film de neige immaculée. On ne voyait de tout en haut que l'ombre grise des chaînes montagneuses qui froissaient de leur relief le papier blanc du sol. D'ici en haut, on ne voyait la Terre que comme un mouchoir chiffoné. Plus loin, la neige avait laissé l'herbe étaler ses lambeaux, et on voyait de temps à autre une route sinueuse comme un spaghetti tombé sur la table, qui indiquait que le relief était probablement plus capricieux qu'on ne pouvait le deviner du haut de notre petit monde. Nous survolions les plaines de Mongolie et tout l'avion dormait pourtant. Puis l'océan de nuages a recouvert la Terre et j'ai replongé moi aussi dans mon sommeil de coton.

Bon, là, rien à signaler à part une heure de retard, et puis l'atterrissage en douceur, le monde reprend ses proportions et j'y reprends ma place. A l'arrivée, bonne surprise : une interprète chinois-français a été désignée pour me prendre en charge toute la semaine du tournoi et elle partage même ma chambre. C'est le top du top !!! Elle s'appelle Sendi, elle est super sympa, elle termine un master de traduction vers l'anglais et le français. Donc elle a presque mon âge.

Guiyang est presque aussi beau que Guilin. Le temps y est plus sec - pour la première fois depuis que je suis en Chine, je ne sens pas perler la sueur dès que je sors - et ici, les collines verdoient de la tête au pied. On voit pousser en mosaïques irrégulières des tournesols, du maïs, des arbres fruitiers et même des cactus, mais surtout des rizières étagées dont les tiges vertes ploient sous le vent léger. L'hôtel, qui est aussi le lieu du tournoi, est situé en pleine campagne ; à trois kilomètres de là, dans le village le plus proche, on a dû s'arrêter pour laisser passer un troupeau de buffles (heurter un buffle peut vous coûter très cher). De grands lacs s'étendent autour des collines et celui dont la plage est au pied de notre hôtel m'a l'air aussi grand que la Belgique entière. Devant notre hôtel, des drapeaux de toutes les couleurs bordent le chemin et de grans ballons rouges signalent à des kilomètres à la ronde qu'il y a ici un tournoi de Go.

On est environ 150 à participer au tournoi. Je sympathise tout de suite avec la guide, mais aussi avec son prof d'anglais, qui est un joueur très fort. On participe à un grand banquet de bienvenue ; Sendi traduit tous les discours dans le micro, et puis je me rends compte que je suis la seule à ne pas parler chinois. Le syndrôme de l'Européenne superstar reprend : pendant le repas, plusieurs tables se déplacent vers la nôtre pour trinquer avec moi. Je suis très mal à l'aise et puis je bois de l'alcool de riz et ça va de mieux en mieux.

Plus tard, on a une réunion pour expliquer les règles, et j'en profite pour jouer avec quelques Chinois qui passent par là. Le premier, qui affirme être très faible, m'écrase trois fois d'affilée sans handicap. Le second, qui admet être plus fort, m'écrase à 5 pierres, puis décide qu'il est temps d'aller dormir parce que demain on doit jouer trois rondes. Tous les jours on doit jouer trois rondes en fait. On doit jouer onze rondes avec 75 minutes chacun ; ça va être long et éprouvant, mais je ferai de mon mieux parce que je représente la Belgique !!! Et puis parce qu'une superstar, ça doit assurer...

Après, les Coréens arrivent. Ils sont 3, ils sont 7d, ils sont jeunes et dans la force de l'âge, et ils ne parlent ni anglais ni chinois. Marie à la rescousse : j'ai un super dico de traduction coréen-chinois électronique ! Bon, vous voyez que c'était pas une dépense inutile...

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Commentaires
B
Allez la Belgique ! \o/
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